Dédicace de la paroisse Oyack Emmanuel : « Au bout de cinq semaines, nous avons mobilisé 10 millions de Fcfa comme un jeu, alors que les travaux étaient engagés bien avant avec les 2,5 millions de Fcfa de la première offrande »

Interview du Révérend Martin Gervais Mbarga Mveng, pasteur et modérateur de la paroisse Oyack Emmanuel de Mbalmayo, à l’occasion de la dédicace du temple construit de concert avec ses fidèles en un temps record, alors que nombreux sont ceux qui trouvaient au départ irréaliste cette mirifique réalisation. Joyau architectural qui suscite moult commentaires aujourd’hui, cette paroisse est une véritable œuvre de foi.

 

Révérend,  pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je suis Mbarga Mveng Gervais, pasteur de l’Eglise presbytérienne camerounaise, synode Métet, consistoire Métet. Je suis actuellement pasteur de la paroisse Oyack Emmanuel, appelée affectueusement : ‘’Dieu est avec nous’’. J’ai été consacré pasteur le 24 juillet 2016 à Métet.

Après cette cérémonie de dédicace de votre chapelle réussie à 100%, en tant qu’acteur majeur de sa construction, quel est votre sentiment ?

De façon péremptoire, je dirai que mon sentiment c’est celui d’une personne à qui le Seigneur a accordé la grâce de voir ce jour de dédicace se dérouler effectivement. Parce qu’il faut vous le dire, il y a trois ans que nous avons annoncé et programmé la dédicace sans que nous n’ayons entrepris quoi que ce soit. Généralement la dédicace intervient après des réalisations. Il faut préalablement construire pour envisager organiser une dédicace. Mais nous, sans avoir engagé quelque chose, nous avons programmé la dédicace pour le dernier dimanche de l’Avent de la troisième année, le 22 décembre 2019.

Une histoire de foi ?

Une histoire de foi, une œuvre de foi. Le Seigneur  a créé notre intention et l’a traduite en acte par cette dédicace, d’où le sentiment de joie et surtout le sentiment parfait d’avoir accompli cette œuvre.

On se rend compte, d’après votre témoignage, que tout était à faire lorsque vous preniez les rênes de cette paroisse. Peut-on savoir quel a été votre secret pour qu’en si peu de temps vous parveniez à sortir de terre ce joyau architectural ? 

Il faut que je vous restitue l’histoire. Je suis affecté dans cette paroisse le 24 juillet 2016, le jour de ma consécration, et je suis installé le 30 du même mois. J’ai trouvé ici deux temples dont l’un en matériaux provisoires. Le premier temple était encerclé par un deuxième que la Communauté envisageait de parfaire la construction. Et dans notre fonctionnement, celui de notre Eglise, pour ériger une chapelle  en paroisse, il faut qu’elle présente un temple et une résidence du pasteur. Les fidèles avaient alors rapidement fait quelque chose pour montrer leur bonne intention et leur capacité future de passer de communauté à paroisse. Lorsque j’arrive, je trouve le temple provisoire, leur futur temple. Le 30 juillet, je fais le tour du bâtiment, après mon installation. C’est ainsi que je réunis ce jour même les anciens d’Eglise et autres. Ceux-ci étaient dans l’euphorie en me présentant ce qu’ils avaient déjà fait. Malheureusement pour eux, j’avais commencé par une mauvaise nouvelle, en leur disant que ni le premier, ni le deuxième temple n’étaient dignes de ce nom. Ce qui avait créé un climat de choc. En fait, j’avais trouvé le bâtiment au niveau du chaînage, les chrétiens espéraient poser la toiture avec le nouveau pasteur. Et lors de la session qui suivait, je leur ai présenté le plan du futur temple que j’avais apporté, pour qu’ils voient ce qu’on appelle temple. Alors, au lieu de la joie, c’était de la désolation. Ils se demandaient si on allait casser tout ce qui était le fruit de leurs efforts. Effectivement ce n’est pas possible de le faire. C’est pourquoi j’ai pris l’exemple en leur parlant du premier temple où nous étions en ces moments-là, qui n’a pas été détruit, avec la construction du deuxième temple. Alors, ai-je dit, pourquoi ne me laisserez-vous pas construire le mien ? C’est ainsi que je leur ai donné rendez-vous à la première offrande pour la construction de cet édifice, car c’est elle qui devait déterminer si oui ou non nous serions capables de le bâtir. Ils se sont demandé alors où nous allions trouver de l’argent. A cette question, la réponse était une fois encore, ‘’rendez-vous à la première offrande’’.

En fait, j’avais institué cent groupes constitués d’anciens et de diacres. La force de cette chapelle est que, lors de son érection, on s’est retrouvé avec 25 anciens d’Eglise et une vingtaine de diacres. En réalité c’est une chapelle de la grande paroisse de Mbalmayo et les fidèles avaient fait une sorte de référendum. On demandait à ceux-ci de faire un choix entre Oyack et les autres chapelles. Beaucoup de gens ont préféré restés ici. Lorsque j’arrive, je me dis qu’avec ce nombre d’anciens, les choses allaient bien se passer. C’est ainsi que chacun de ces cent groupes devait verser dans les caisses de la paroisse 100.000 Fcfa en cinq semaines, soit 20.000 Fcfa par semaine. Lorsqu’un groupe se trouvait dans l’incapacité de le faire, il pouvait faire recours aux réseaux. En fait, c’est au marketing de réseaux que j’ai fait recours. Ceci du fait que, selon leurs dires, la plus grande offrande jusque-là n’avait jamais dépassé 300.000 Fcfa.

 Nous sommes au mois de juillet, nous nous donnons rendez-vous en octobre. J’avais par ailleurs trouvé 10 candidats anciens d’Eglise et 10 candidats diacres que j’ai consacrés parce que je ne voulais plus entendre parler de candidats, ce d’autant plus que leur consécration il fallait que chacun paie 50.000 Fcfa, achète une chèvre et deux paires de draps. Il faut dire que ces candidats n’y parvenaient pas parfois. Je ne leur ai rien demandé pour le faire. Ce jour-là même a eu lieu notre première offrande qui était tout un pari. Il était question, comme je leur disais, que nous atteignons deux millions de Fcfa, pour être sûrs que nous étions à même de construire notre temple. L’opération que nous avons lancée consistait à récolter deux millions par semaine, chaque groupe devant apporter 20.000 Fcfa. Le premier jour, nous avons atteint 2.500.000 Fcfa (deux millions cinq cents mille francs Cfa). A partir de là, les choses ont commencé à se dessiner. Le secret est donc que le Seigneur lui-même a béni notre stratégie. Au bout de cinq semaines, nous avons effectivement mobilisé nos 10 millions comme un jeu, et nous n’avons pas attendu cette échéance pour engager les travaux, car c’est généralement le fait de vouloir obtenir la somme d’argent convenue pour la réalisation des projets, même de construction, qui plombe la plupart.  En fait, dès que nous avons atteint 2 millions et demi, le lundi qui suivait, les travaux ont été lancés. On a fait l’implantation et les fouilles et on a attendu le 25 décembre pour procéder à la pose de la première pierre.

Peut-on avoir une idée du coût de ce gigantesque bijou ? 

J’avoue que je ne peux pas l’évaluer, je vous assure. Pas parce que nous refusons de le faire, mais simplement qu’on ne peut l’évaluer étant donné que c’est une histoire de foi. Une œuvre de foi. Je vous assure que personne n’a jamais cherché à faire des calculs. Tout ce qu’on sait est que, tous les dimanches on avait des offrandes et les lundis tout l’argent était fini. Déjà, tous les dimanches, depuis trois ans, après le culte et qu’on avait dit ‘’Amen’’, on se réunissait, les anciens et les diacres afin de se demander ce qu’il fallait envisager pour les jours suivants. J’ai en fait utilisé le management participatif. Qu’est-ce qu’on doit faire, alors on pense à acheter par exemple deux sacs de ciment et autres. Du coup, on se rabat vers la trésorière pour qu’elle dévoile son fond de caisse. C’est ainsi qu’on affectait immédiatement tout cet argent à des tâches précises, et rendez-vous était pris pour le prochain dimanche. Peut-être que maintenant nous pouvons nous asseoir pour faire une sorte de bilan. Mais c’est d’ailleurs difficile d’y parvenir.

Des témoignages recueillis çà et là nous laissent croire que vous êtes un serviteur de Dieu dévoué, de commerce agréable, novateur et même efficient, qui a commencé à se faire remarquer par des actes forts comme la construction du bâtiment dont vous avez été l’architecte en chef. Mais est-ce que tout cela ne vous vaut que des louanges ? Ne trouvez-vous pas d’obstacles dans l’accomplissement de votre mission divine à la chapelle d’Oyack Emmanuel ?

Il y a eu les doutes au départ, par rapport à la construction de ce temple, parce que les gens pensaient que c’était irréaliste. Ensuite, il y a eu un essoufflement qui a failli créer une exacerbation.  C’est-à-dire que s’était trop demander, tous les jours et tous les jours, aux fidèles. Un moment, je me rappelle au cours d’une session, les anciens ont  préconisé que nous arrêtions d’abord, tout en se référant à ce qui se passe ailleurs. Je leur ai répondu qu’ils avaient leur calendrier et moi le mien. Mais le Seigneur m’a accompagné puisque j’ai pu, à chaque fois, les ramener vers l’objectif du 22 décembre 2019. Je leur disais alors que quel que soit le niveau des réalisations, il y aura la dédicace. Parce qu’en fait, la dédicace ne veut pas dire automatiquement que le travail est fini. La dédicace veut simplement dire qu’on invite Dieu, on consacre à Dieu l’ouvrage. On donne à Dieu l’ouvrage. Ça ne veut pas dire qu’on n’a plus rien à faire, parce que le temple c’est l’entretien. Ce qui fait que, lorsqu’on pense finir de construire, il y a toujours des pans qui constituent des barrières à la réalisation.

 J’ai rencontré des difficultés, mais j’ai aussi eu beaucoup de grâces en tant que premier pasteur de cette paroisse qui a été érigée 14 jours avant ma consécration. Je peux dire que cette paroisse et moi avons le même âge. Comme premier pasteur, je pense que les fidèles m’ont beaucoup écouté. Ils ne m’ont pas créé des problèmes dans l’exercice de ma mission. Je n’ai pas connu l’opposition dans ma gestion spirituelle et managériale jusqu’ici. Ça m’a beaucoup aidé. Parce que dans certaines paroisses, très généralement entre les pasteurs et les anciens, par exemple, ce sont des sons de cloche discordants. Mais ici, cela n’existe pas. Au contraire, je suis même un peu embêté du fait qu’on pense que je suis le seul à avoir le mot juste. On m’attend sur tout, c’est gênant mais c’est aussi une force, ce d’autant plus que cela a permis que la Communauté ne soit pas dispersée.

 Quel est le message, après cette mirobolante réalisation, que vous pouvez adresser aujourd’hui à vos fidèles ? 

Je l’ai dit lors du culte. Je félicite mes chrétiens, parce que beaucoup de gens pensent que nous avions eu des subventions. Beaucoup de gens peuvent croire qu’Oyack à la grâce parce qu’il y a affinité.  Les chrétiens d’Oyack se sont serré la ceinture.

Je connais une femme dans ma paroisse, une veuve qui a construit des boutiques au marché, qui, après avoir fini les constructions celles-ci sont restées des années sans clients. Un jour, elle est venue me voir pour me faire part de cette situation, et lui ai dit qu’il fallait qu’elle les confie à Dieu. Et finalement, elle a pris l’engagement. Cette veuve, après notre entrevue, a vu ses quatre boutiques prises en location. Et l’avance de loyer qu’on lui a versée, elle l’a apportée à l’Eglise. Les gens qui n’ont rien ont compris qu’avec Dieu, ils ont tout. Le miracle s’est produit. Beaucoup, pour ne pas dire tous, pensent qu’Oyack a eu un financement. L’information que je vous donne est qu’Oyack n’a reçu aucun financement. Les chrétiens ont tout donné, je dis tout donné. C’est là où je parle d’une histoire de foi. Les gens ont compris qu’ils peuvent être entraînés dans quelque chose qu’ils ne parviennent pas au départ à expliquer. Personne ne peut expliquer, à la vérité, ce qui s’est passé, seul Dieu. Ils en sont fiers, c’est pourquoi je les félicite, et j’espère que le Seigneur les a bénis pour l’œuvre accomplie, parce qu’en trois ans de construction, je n’ai signé aucune demande d’aide, mais nous avons reçu des contributions des passants. Mes fidèles sont à féliciter et que le Seigneur les bénisse abondamment.

Peut-être qu’il y a des aspects que nous n’avons pas évoqués sur lesquels vous vouliez dire quelque chose ? 

Je pense que nous avons abordé tous les aspects, mais je voudrais in fine dire que Dieu existe bel et bien, et c’est nous qui refusons de comprendre que ce Dieu que nous servons est tout puissant et qu’avec lui les espoirs ne sont pas perdus. La construction de ce temple doit pouvoir montrer aux gens comment Dieu agit. Dieu est capable de te faire sortir du fumier pour te faire asseoir aux cimes. La construction du temple, c’est comme le reflet de ce que Dieu est capable de faire même dans nos vies personnelles. Même dans nos projets personnels, Dieu est capable de faire des choses inexplicables.

Révérend, après la construction de ce temple avez-vous d’autres projets en vue ?

 

Comme vous le savez, je suis pasteur, en tant que tel, je n’ai pas droit à un titre foncier ici. Je suis un serviteur de Dieu et un employé du Consistoire. Donc le Consistoire peut m’envoyer là où il estime. Mais certainement, à chaque milieu son cahier des charges. Les cahiers des charges ne sont pas préparés d’avance. Lorsque le Seigneur vous envoie dans une communauté, il vous dit ce que vous y allez faire. C’est ça le mystère de notre ministère. Ici, c’était la construction et ailleurs ce sera quoi ? Je ne sais pas. Mais au niveau de l’Eglise centrale, je suis le président du Comité de l’opération 200F par fidèle ? On a mis en place, à l’EPC, l’opération 200F par fidèle. Chaque fidèle devrait donner  200F. J’ai un mandat de trois ans. Et c’est une opération à vie. Et si chaque chrétien donne 200F, nous avons ce chiffre multiplié par 4 millions et demi que nous sommes en tant que fidèles. Je suis le président de cette opération pour toute l’EPC. Cet argent vise à restaurer les écoles et les hôpitaux de l’EPC. On a commencé l’opération, j’ai dû mettre un bémol parce qu’il fallait faire avancer le projet de la dédicace. L’Eglise m’a donc confié la mission de restaurer ses écoles et ses hôpitaux à la faveur de cette opération. Si tous les fidèles donnent 200F, nous serions à 900 millions de Fcfa, mais si c’est 1000F, en supposant que la majorité peut se le permettre, nous serions à 4 milliards et demi de Fcfa. Ce projet a déjà été lancé, et dans les jours à venir, probablement au mois de février 2020, nous aurions la première cargaison, un conteneur de 40 pieds de matériels d’hôpitaux. Nous allons commencer par l’hôpital de Métet que j’ai choisi comme point focal de ce projet. Nous allons entièrement le restaurer, compte tenu de 40 pieds de matériels d’hôpitaux, les lits et pratiquement tout ce qui est nécessaire pour les centres hospitaliers  lui seront fournis. A cette occasion, il y aura une grande cérémonie de réception de ce matériel soit à Oyack, ou alors à Métet.      Je vous remercie.

 

                    Propos recueillis par Joseph Mbarga Ntsama

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