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A  L’initiative du centre d’information pour la coopération Sud-Sud et Triangulaire de l’OEACP,  les 7 et 8 novembre dernier s'est tenu à Sipopo, en Guinée équatoriale, un forum régional de haut niveau. C’est en vue de stimuler la croissance du secteur agricole dans les 79 pays membres de l'Organisation des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP). Ouvert par le président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, ce rendez-vous a rassemblé un nombre important de participants et d'organismes internationaux comme le Fonds international de développement agricole (FIDA). Dans un entretien accordé à La Découverte Régionale, Patrice Niyongabo, directeur du dit centre d'information et chef de mission en Guinée équatoriale, en situe les enjeux et le rôle de la coopération Sud-Sud  selon l'OEACP, en vue notamment de l'accélération de la productivité et de la compétitivité du secteur agricole dans les pays membres de cette organisation.

La coopération sud-sud est le principal objectif déclaré de l’Organisation des Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Comment se traduit-elle dans les faits dans le domaine de l’agriculture surtout ?

Merci, je dois dire tout d’abord que vous avez raison, le principe de la coopération sud-sud est enraciné dans notre organisation, à la fois pour le passé et le futur. Parce que, dès la création de l’OEACP en 1975, les Etats-membres ont mis à cœur l’objectif du renforcement de la solidarité. La coopération sud-sud a été encore une fois amorcée lors du 7e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement qui s’est tenu ici à Malabo sous le leadership du président Obiang Nguema Mbasogo, président de la République de la Guinée Equatoriale, qui était alors président en exercice du Sommet. Sommet au cours duquel il a impulsé ce principe de renforcement et qui a débouché sur l’adoption de la décision de création de Centre de coopération sud-sud et triangulaire.  Et maintenant, par rapport à l’agriculture, d’ailleurs comme vous le savez, de par sa constitution, tous les Etats-membres de l’OEACP sont des pays essentiellement agricoles. La plupart de 79 membres que compte l’Organisation, 48 sont des Etats africains. Les pays africains sont essentiellement agricoles, c’est le cas dans les Caraïbes et même du Pacifique. Donc l’agriculture est pour nous un secteur important qui doit être un moteur de développement de nos Etats. C’est d’ailleurs pour cela que le Forum qui vient de se tenir ici à Sipopo s’est inscrit dans le cadre du plan stratégique du Centre allant dans le sens de renforcement de la coopération sud-sud, échange d’expériences et de pratiques dans nos Etats. C’était le premier Forum parmi une série. Nous avons choisi de mettre un point d’honneur sur le secteur agricole qui est le plus important pour nous. Il y en aura d’autres fora dans un avenir proche, au cours des quels nous pourrions alors attaquer d’autes secteurs comme l’environnement, l’intégration régionale et beaucoup bien d’autres aspects. C’est pour vous dire que nous avions réservé à l’agriculture la première place dans la série, pour montrer que le secteur agricole est très important.

Les disparités économiques qui caractérisent les différents pays membres de cette Organisation facilitent-elles des avancées dans  l’exécution de cet agenda ?

Absolument ! C’est vrai nous sommes quand-même une Organisation très diversifiée, une organisation tricontinentale, étendue sur trois continents et bien diverse au niveau de l’économie, au niveau des cultures, au niveau même géographique, étant donné que nous sommes sur trois continents. Mais  ce qui paraît être un obstacle pour la cohésion au niveau de notre organisation est plutôt un avantage. L’un des principaux atouts de l’OEACP, c’est justement d’avoir cette sorte d’hétérogénéité au niveau de nos Etats-membres, qui permet justement, surtout dans le cadre de la coopération sud-sud, l’échange d’expériences. C’est donc un agenda que nous allons poursuivre. Nous considérons que cette hétérogénéité est un atout majeur pour les Etats-membres pour poursuivre cet agenda, ces Etats étant appelés à échanger mutuellement les expériences parce qu’ils sont fondamentalement différents.

 De quels mécanismes  l’OEACP dispose-t-elle pour la mise en œuvre des recommandations issues  d’un  rendez-vous comme c’était le  Forum régional de haut niveau qui vient de se tenir à Sipopo en Guinée Equatoriale ?

Encore une fois, je crois que l’une des forces et l’un des avantages comparatifs dont dispose l’OEACP dans la mise en œuvre des programmes, notamment en ce qui concerne la coopération sud-sud, c’est son cadre institutionnel bien élaboré. Parce que, nous avons des mécanismes de mise en œuvre des programmes. Et pour cela nous disposons d’un certain nombre d’organes, à commencer par le Sommet des Chefs d’Etat qui est un l’organe suprême de l’Organisation. Celui-ci définit de manière générale les politiques de notre Organisation. Nous avons aussi un Conseil de ministres qui se réunit au moins deux fois par an et qui participe à l’élaboration de cette politique. De même qu’un Comité des ambassadeurs à Bruxelles qui se réunit chaque mois, pour discuter de notre agenda de développement. Mais également la Commission interparlementaire qui se réunit plusieurs fois par an. Sans oublier ce qui tient lieu d’organe exécutif et technique de tous les autres, à savoir le Secrétariat,  et bien entendu le Centre d’information de Malabo qui est un bras technique, si vous voulez un levier supplémentaire dont dispose l’OEACP pour la mise en œuvre de ses programmes. Nous passons par tous ces mécanismes, chaque fois que nous avons des recommandations issues du Forum, lesquelles sont déjà constituées en termes de matrice de suivi qui vont être rapportées dans nos programmes, puis au prochain Conseil des ministres.  Et C’est ce Conseil qui se charge de définir les politiques allant dans le sens de nous donner plus d’orientations dans la mise en œuvre d’un projet. C’est pour vous dire que, nous avons un cadre de mise en œuvre très cohérent. J’ai omis de mentionner aussi que nous avons ce que nous appelons le Comité interrégional qui se charge des commissions interrégionales. Comme en Afrique Centrale qui était la région d’accueil de ce Forum, nous avons dans le cadre de l’organisation générale, la CEAC, aussi un mécanisme de coopération avec la CEMAC ; ces institutions régionales avec lesquelles nous travaillons afin de mener les actions en synergie dans la mise en œuvre de toute recommandation élaborée dans le cadre du Forum.

Spécifiquement, l’’Afrique en général et l’Afrique Centrale en particulier recèlent d’immenses terres arables, mais la sous-région et le continent n’arrêtent pas d’importer massivement, et à coût de milliards de Fcfa, des denrées alimentaires venant des autres régions du monde. Quelle solution l’OEACP apporte-t-elle pour mettre fin à cette demande alimentaire qui les fragilise et grève lourdement les budgets des Etats ?

Si vous avez suivi notre forum, le thème principal était justement centré sur cette problématique. ‘’Libérer le potentiel du secteur agricole, d’industrialisation et des chaînes de valeurs agricoles » était le fil conducteur des travaux. Parce que comme vous le dites si bien, notre continent, l’Afrique Centrale particulièrement est très riche en ressources naturelles. Nous avons vraiment des meilleures terres arables au monde, nous avons des sources hydriques les plus denses au monde, mais nous n’avons pas jusqu’à présent, au niveau de l’Afrique Centrale, essayé de rendre productif ce potentiel agricole. C’est la raison pour laquelle, au lendemain de l’éclatement de la crise russo-ukrainienne, nous avons vu au niveau du continent, plusieurs pays souffrir de l’insécurité alimentaire. Et nous pensons que ce n’est pas une situation normale, c’est pourquoi nous avons estimé que ce Forum était nécessaire pour éveiller les politiques, éveiller les investisseurs privés dans le sens du développement de nos propres ressources, au lieu d’envoyer centaines de milliers de nos devises à l’étranger. Non seulement notre économie se trouve affectée au niveau des devises étrangères, mais aussi nous sommes en train d’exporter notre propre travail. Nous avons une jeunesse au chômage, nous allons mettre à profit l’agriculture qui crée de l’emploi, qui crée des investissements et qui préserve notre source en devises dont nous ne disposons pas à suffisance.  Donc l’OEACP est engagée dans cette logique à accompagner nos Etats à renforcer leurs maillons de sécurité alimentaire, à accroître l’industrialisation, à accroître les chaînes de valeurs agricoles. Il est question d’éviter au maximum d’exporter des produits en Europe qui nous reviennent sous une forme transformée et pour lesquels nous payons dix fois plus cher. C’est dans cette perspective que nous sommes engagés et nous sommes résolus à travailler avec nos partenaires. Nous sommes d’ailleurs déjà en train de le faire avec des partenaires au développement, comme la Banque centrale de développement. Nous allons aussi travailler avec les commissions régionales pour pouvoir inciter nos gouvernements à développer ce secteur agricole. Un secteur qui va, non seulement  permettre de s’auto-suffire parlant de l’alimentation, mais également d’exporter des produits à valeurs qui rapportent des devises. Il y a une politique de l’exportation, il y a aussi une politique de la création des emplois à la faveur de nos jeunes. Mais aussi dans toute la sphère de production, vous allez voir que l’agriculture, en Afrique Centrale, pourra être transformée, mécanisée et la pratique encouragée. Par exemple lors du Forum, on avait un panel spécialement dédié aux politiques règlementaires et de la régulation, dans le cadre duquel nous avons parlé des défis de financements, des défis de changements climatiques parce qu’il faut aussi éduquer nos populations à adopter des pratiques agricoles. Il y avait aussi un cadre de partenariat et de coopération pour inciter nos Etats. Moi particulièrement, j’étais très content de voir les femmes productrices du Congo, du Tchad, des investisseurs hommes et femmes venir échanger leurs expériences et parler de leurs défis. Toutes choses qui ont  revêtu l’aspect d’une plateforme d’échanges, de coopération qui peut être adoptée dans d’autres circonstances. Donc voilà l’apport de l’OEACP, c’est justement d’accompagner nos gouvernements dans l’adoption de nouvelles méthodes de production, en vue de renforcer la productivité et le transfert des technologies.

A cause de leur volume faible, les budgets alloués par les pays d’Afrique Centrale et du Continent ne permettent pas d’accroître la productivité et la compétitivité du secteur agricole et par conséquent à satisfaire les besoins des populations, quel rôle l’OEACP joue-t-elle pour les encourager à inverser la tendance ?

L’un des principaux défis de nos économies est celui des financements publics et privés en faveur de l’agriculture. C’est pourquoi, comme je le disais, le premier panel de discussion dans notre Forum était basé sur le cadre politique et réglementaire, où nous invitions les gouvernements, notamment les ministres de l’Agriculture qui étaient présents à ce forum à discuter de cette problématique de programmation politique d’investissement public. Parce qu’en fait, on ne peut pas parler d’industrialisation et de développement des chaînes de valeurs sans qu’il y ait des infrastructures accommodantes pour l’essor de l’agriculture. Il faut construire des infrastructures routières pour pouvoir permettre le transport des produits agricoles, il faut construire des zones de stockage de ces produits. Vous imagez un  propriétaire de 100 ou 200 hectares de tomates qui vit à 300 km de la capitale, s’il n’a pas les moyens de les transporter pour les rendre disponibles à la consommation, ces tomates vont pourrir. C’est pour cela que nous encourageons les Etats à l’investissement public d’abord, puis à la construction des infrastructures routières pour permettre les échanges, des structures de stockage. Et l’investissement privé aussi, parce que, celui-ci est primordial dans nos économies. Pouvoir permettre aux investisseurs privés de venir injecter leurs efforts dans la réforme agricole qui est salutaire. Parce que, à tort, jusqu’à présent l’agriculture est identifiée comme un secteur non-productif en Afrique Centrale par exemple, parce que les gens qui ont de l’argent pensent et continuent à penser que le secteur agricole n’est réservé qu’aux paysans. Et pourtant, l’agriculture a prouvé déjà dans d’autres régions du monde qu’elle peut beaucoup porter en termes de rendements économiques. L’autre aspect, c’est le financement. Nous avons aussi encouragé les banques, les assurances, à accompagner les agriculteurs parce que nous avons même pensé à la création des banques des crédits agricoles qui devraient accompagner les agriculteurs à obtenir des crédits que les banques traditionnelles ne permettent pas. Mais aussi, au niveau du financement public, nous encourageons nos Etats à se conformer à la déclaration de Maputo et de Malabo qui, il y a dix ans, les invitait à investir au moins 10% du budget national dans le secteur agricole. Mais la moyenne en Afrique Centrale est actuellement de  4%, ce qui reste très marginal par rapport à l’engagement de Maputo et de Malabo en 2013. Autant des questions sur lesquelles nous avons discuté, et je pense que dans cette perspective nous allons continuer de dialoguer dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations, tous les Etats de l’Afrique Centrale étant des Etats-membres de l’Acp et les inviter à accroître leurs contributions dans leurs budgets alloués à l’agriculture. Il est aussi question de créer un environnement favorable à l’investissement privé, c’est très important. Souvent on invite les agriculteurs  et les investisseurs privés en oubliant que le politique s’invite également, parce que lorsque l’environnement politique n’est pas favorable, tous les investisseurs sont réticents. Par exemple là où les politiques sont toujours changeantes, on ne sait pas si on pourra même arriver à la fin d’un projet sans qu’il ait bouleversement, ce n’est pas de nature à encourager. C’est le nœud du problème, raison pour laquelle nous avons convié ce forum de haut niveau en le qualifiant de politique, parce qu’il faut parler au politique, c’est le politique qui influence l’économique. Tous les investisseurs suivent la tendance économique et l’environnement des affaires.

A quoi peut-on s’attendre de manière concrète des résolutions de ce Forum régional de haut niveau qui vient de se tenir en Guinée Equatoriale qui est la résidence régionale de l’OEACP ? On aurait pu ajouter à cette question celle de savoir combien de pays regroupe le Centre qui se trouve en Guinée Equatoriale ?

Le Centre pour la coopération sud-sud est basé en Afrique Centrale et en Guinée Equatoriale. Mais si vous voulez ses domaines d’intervention, ils s’étendent sur les 79 membres de l’OEACP. Comme vous le savez, notre siège principal se trouve à Bruxelles, nous avons un bureau à Genève, lorsque nous avons créé le Centre de coopération sud-sud, les Etats-membres ont dit qu’ils ne pouvaient pas tout de même ériger un bureau de coopération sud-sud au Nord, à Bruxelles. La destination naturelle du Centre devait être au Sud. Il se trouve que nous soyons ici à Malabo, parce que la décision était prise de créer cette structure de suivi de coopération sud-sud de l’OEACP. Bien que les Etats membres avaient été appelés à poser les candidatures, la Guinée Equatoriale qui avait abrité le 7e Sommet qui a vu naître le Centre, s’était portée candidate en premier. Le président de la République, S.E. Obiang Nguema Mbasogo, il faut le dire sans ambages avait porté à cœur ce Centre, il était l’inspirateur. C’est lui qui, alors président en exercice de l’OEACP avait piloté sa création. Le Centre est en Afrique Centrale, mais couvre tous les Etats-membres de l’organisation. Maintenant par rapport à l’autre question, il faut souligner que dès le lendemain de la clôture du Forum, nous avons rencontré le commissaire de la CEAC et de la CEMAC, pour discuter réellement du cadre du suivi. Certains partenaires au développement comme la FIDA, FAO étaient présents. Nous avons créé à quatre un mécanisme de synergie. Cela avait été une des recommandations du forum, créer un mécanisme de suivi, évaluation au sein de l’OEACP pour la coordination des associations régionales et les partenaires de développement impliqués dans l’agriculture, afin de permettre une sorte de mise en œuvre coordonnée. Et parce qu’au niveau de la coopération sud-sud, nous favorisons plus l’échange d’expériences et de bonnes pratiques, nous allons justement élaborer des projets-pilotes, en droite ligne des recommandations dans certains pays-pilotes. Cela pourrait être ici en Guinée Equatoriale ou au Cameroun ou dans un autre pays, mais de manière à ce que les leaders de ces projets-pilotes puissent partager les expériences avec les autres et au fur et à mesure, dans le cadre de nos interventions générales. Nous voulons en fait que le forum qui s’est tenu en Afrique Centrale soit un forum-pilote pour les autres régions, parce que les problèmes qui se posent ici sont les mêmes en Afrique de l’Ouest, en Afrique de l’Est. Nous avons commencé ce Forum et nous allons continuer en apprenant des expériences des autres régions et en apportant les nôtres dans la mise en œuvre de ces recommandations.

Parlant de la communication, vos activités sont très peu connues de l’ensemble de la population, celle de l’Afrique Centrale notamment, elle qui est pourtant censée être la principale bénéficiaire de cet espace. Qu’est-ce qui peut justifier cette quasi-absence de la communication autour de vos actions ?

Votre question est un grand défi que vous me lancez, mais je voudrais dire, comme vous avez fait le constat, la communication de nos actions à nos parties prenantes qui sont les populations que nous servons, est un défi important pour notre organisation comme pour toute autre organisation. Je vous remercie pour cette plateforme que vous offrez au Centre pour pouvoir expliquer nos orientations et nos objectifs à travers votre organe de presse. Au niveau du Centre, nous sommes relativement nouveaux. Il y a quelques mois, nous avons célébré notre deuxième anniversaire ici à Malabo, donc je pense que nous sommes sur le chemin de multiplier des medias partenaires qui peuvent nous aider à porter plus loin nos actions, parce que la visibilité est notre raison d’être ici. Nous voulons être visibles, nous voulons communiquer et nous voulons être directement en contact avec les personnes que nous servons. Il y a donc d’abord cette jeunesse, mais maintenant au niveau de l’OEACP globalement, je dois dire que nous ne sommes pas très visibles dans nos 79 Etats, ce n’est pas uniquement pour le Centre qui est nouveau, c’est pourquoi nous venons d’élaborer, en fait au niveau du secrétariat, il a été mis en place une stratégie de communication qui va permettre d’aller en contact dans nos régions, communiquer à travers elles. Nous allons créer un réseau de medias partenaires qui peuvent nous aider à faire ce travail. Je pense que c’est un  exercice continu qu’on doit le faire, à commencer par cette plateforme qu’est La Découverte Régionale que j’espère  pouvoir nous aider dans la perspective de communication de nos actions.

                                                        Interview par  Joseph Ntsama Mbarga et Raphaël  Mvogo

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